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OCTAVIO : récit du voyage Made In France d’une startup de l’audio

By 3 mai 2021mars 22nd, 2024No Comments

Découvrez STORIES : spécial Made in France, une série de témoignages d’entrepreneurs hardware ayant tenté le Made in France. Vous y découvrirez leurs aventures uniques, leurs expériences et leurs retours terrains, qu’ils soient positifs ou négatifs mais toujours sans langue de bois.  

Pour ce deuxième volet de notre série consacrée au Made in France, nous avons eu la chance de nous entretenir avec Victor Gignon, co-fondateur d’Octavio.   

Sa jeune entreprise développe un streamer audio permettant aux anciens dispositifs sons de profiter des dernières nouveautés technologiques de diffusions sonores. Fonctionnalités bluetooth, WIFI, services de streaming ou encore le multi-room ; avec Octavio, vous permettez la réutilisation des vieux systèmes audio en leur offrant une nouvelle jeunesse. 

Du crowdfunding au développement produit, étapes préliminaires d’une startup hardware.

Genèse

C’est en 2018 que nous avons eu cette idée avec David, co-fondateur d’Octavio. À l’époque encore étudiants, nous avons pu bénéficier de l’accompagnement de l’incubateur Plaine Images de Tourcoing.  

Nous avons assez rapidement lancé une campagne de crowdfunding sur Kickstarter, qui nous a permis de récolter un peu plus de 10 000 €. Bien-sûr, 10 000 euros pour faire du hardware, c’est une bien trop petite somme ; mais ça nous a permis de valider un intérêt pour le produit et d’avoir un début de traction. Suite à cela, nous nous sommes lancés dans une longue phase de R&D, de test et de développement produit pendant près de 8 mois. 

En mars 2021, nous avons lancé le produit et livré nos premières précommandes.

Des débuts difficiles 

On ne peut pas dire que les débuts ont été faciles. Nous avons travaillé à deux avec David durant plus d’un an et demi. Tandis qu’il se concentrait sur le développement produit, j’avançais sur la conception mécanique et les problématiques de gestion de l’entreprise.  

Octavio étant un objet connecté, il a également fallu prévoir la partie software sur la carte, ainsi qu’une application pour interfacer le produit. Nous avons dû gérer le design esthétique, la conception mécanique du boitier, le choix des matériaux, l’optimisation de la BOM, le développement électronique et software, la logistique… Cela demande énormément d’expertises diverses.  

Avis Kickmaker : « La difficulté du hardware est effectivement très souvent sous-estimée par les startups, qui,  en général, découvrent au-fur et à mesure les contraintes industrielles et les compétences requises pour le développement produit. Toutes ne se font pas accompagner, mais sur des produits technologiques complexes, cela peut-être fortement bénéfique ».

En plus de tout cela, il faut un certain budget pour faire du hardware. Heureusement, grâce à la traction obtenue sur la campagne de crowdfunding, nous avons pu obtenir des financements et agrandir l’équipe. Notre choix s’est porté sur un ingénieur électronique et une chargée de communication. Nous sommes en BtoC grand public, la communication est primordiale.  

Une forte volonté de Made in France dans la fabrication 

Un mix sino-français 

Si on découpe le produit : toute la partie plastique ainsi que le packaging produit sont fait en France ; la partie électronique est fabriquée en Chine mais l’assemblage de la carte est fait en France, tout comme l’assemblage final du produit. Tout cela nous donne un mix France-Chine qui est plutôt commun aux produits électroniques. Il serait intéressant de rapatrier certains aspects de la fabrication électronique en France. Mais c’est assez compliqué sur certains composants comme les microcontrôleurs spécifiques que nous utilisons et pour lesquels il n’y a pas d’équivalences en France, même en Europe.  

Il est quand même très compliqué de faire un produit 100% français aujourd’hui, rien que d’un point de vue matières premières et électroniques. Les industriels chinois ont beaucoup d’expérience et d’expertise sur ce sujet, qu’il est bien difficile de trouver ailleurs.  

Pourquoi le Made in France ? 

Une des raisons pour laquelle on s’est orienté vers le Made in France : se démarquer des grosses entreprises qui produisent des produits similaires au nôtre. On constate une appétence grandissante des clients pour le Made in France ! C’est un argument marketing imparable, pour peu que l’on maîtrise les coûts.  Et c’est aussi une fierté pour l’équipe Octavio.
Mais ce n’était pas seulement un choix marketing. Nous avons entendu beaucoup de témoignages de sociétés qui, comme la nôtre, essayaient de réduire les coûts en passant par la Chine.  

Mais ils ont dû faire face à des problèmes de production, des imprévus qui nécessitaient parfois un déplacement vers les usines. Il faut alors prendre en compte le coût des billets d’avion aller-retour et, finalement, ce qu’on gagne en coût de production n’est pas toujours rentable aux vues des frais imprévus. En plus de cela, en travaillant en France on n’a pas le problème du décalage horaire et on a l’avantage de la proximité. Par exemple notre injecteur plastique est à 10 kilomètres de chez nous et il fait du super travail !

On essaie au maximum de travailler en France pour que ce soit plus facile de réagir en cas d’imprévu. Par exemple l’an dernier, nous avons dû attendre trois mois l’arrivée de nos puces connectées parce que l’usine chinoise n’en avait plus en stock. Nous aurions pu certainement réduire ce délai si l’usine avait été en France. Il y a tellement d’aspects différents à gérer sur un produit hardware qu’on essaie le plus possible de ne pas être dépendant des acteurs étrangers pour éviter ce genre de soucis.

Anecdote Made in France 

Une anecdote qui illustre tout de même la domination de la Chine dans le secteur des produits électroniques : à l’origine, nous souhaitions intégrer le système Airplay de Apple dans notre produit pour pouvoir offrir une compatibilité multi-plateformes à nos clients. Seulement, en France, il n’y a qu’un seul EMS qui a l’agrégation d’Apple pour intégrer la puce contre 200 en Chine. Nous avons finalement décidé d’abandonner cette option trop contraignante pour le choix de nos partenaires.

Production Made in Local 

Nous avons cherché au maximum à travailler en local, avec des industriels à moins de 20 kilomètres de Lille, pour pouvoir suivre facilement toutes les étapes de production. Nous avons également décidé d’internaliser l’assemblage pour en maîtriser les diverses étapes. Pour le moment, nous réalisons de faibles volumétries (moins de 1000) donc nous pouvons nous permettre d’assembler en interne. Nous ne voulions pas sous-traiter cette partie pour gagner en coût de production, mais dès que les volumes seront plus importants, nous passerons par des associations types ESAT (établissements ou services d’aide par le travail). 

L’aspect local revêtait une importance particulière pour nous. Même si pour nos industriels partenaires il ne s’agit que de petites séries, cela nous permet tout de même d’installer une relation de confiance pour d’éventuels projets futurs. Nous avons assez naturellement trouvé les industriels avec lesquels nous travaillons aujourd’hui, nos partenaires comprennent les besoins et connaissent les contraintes des jeunes entreprises et savent parfaitement s’adapter en fonction.

Startups hardware et financement, une valse endiablée 

L’épineuse question du BFR

La gestion du BFR est particulièrement compliquée pour les startups du hardware. Notre produit coûte 149 euros, donc nos marges par produit ne sont pas très importantes. Le souci, c’est que les délais de production sont parfois très longs et que les usines chinoises demandent de payer à la commande pour finalement recevoir les produit 2 ou 3 mois plus tard. D’un point de vue trésorerie c’est assez conséquent. C’est aussi un des avantages à travailler avec des usines françaises qui, elles, sont beaucoup plus souples sur les délais de paiement. Il faut bien-sûr établir une relation de confiance.  

Levée de fond

On a prévu de lever 450 000 € de fonds vers le mois d’octobre pour continuer notre développement. Pour l’instant nous n’avons pas encore d’investisseurs. Nos fonds proviennent d’une part de la BPI, d’organismes de prêt d’honneur et pour le reste ce sont les revenus des commandes.
C’est assez compliqué de trouver des investisseurs avant d’avoir lancé un premier produit. Heureusement, le nôtre est lancé et nous allons pouvoir prouver que le produit répond aux attentes du marché.

Accompagnement : mine d’or pour le software, un désert pour le hardware.

Lorsque l’on cherchait de l’accompagnement, on s’est rendu compte qu’il y avait beaucoup d’entraides et de témoignages pour le software mais peu pour l’industrialisation de produits high-tech. On aurait aimé que la mise en réseaux soit facilitée : ce n’est pas toujours évident de démarcher les bonnes personnes, ça peut prendre beaucoup de temps. On aurait voulu trouver des acteurs qui nous disent « Moi je suis prêt à conseiller quelqu’un qui souhaite lancer un projet d’industrialisation ».  

Avis Kickmaker : « C’est effectivement quelque chose que l’on constate avec regrets. Au contraire de l’univers du software, le monde du hardware est morcelé, sans réelle unité. Des initiatives existent bien sûr, mais elles restent pour le moment très peu nombreuses. Chez Kickmaker, nous essayons de jouer ce rôle de mise en réseau, de fédérateur d’écosystèmes industriels et hardware. Nous avons en effet la chance de nous situer entre les entreprises, les industriels et les investisseurs. »

Nous avons été accompagnés par la French Tech mais surtout d’un point de vue R&D, tech ou développement ; pas vraiment sur l’aspect production. Je constate qu’il y a une certaine méconnaissance du hardware par certains accompagnants qui pensent que, ce qui a fonctionné pour une startup, peut être transposable pour une autre. Et notamment d’un point de vue investissement. On nous a dit, par exemple, qu’avec 15 000 euros on avait déjà de quoi faire… Mais, quand on prend toutes nos charges, nos coûts et le reste, on ne peut même pas lancer la production avec ce montant. 15 000 euros dans le hardware, ce n’est rien du tout.  

Conseils 

Notre plus grosse erreur, même si je pense que c’est une erreur assez commune quand on se lance sur un projet de ce type, ça a été la sous-estimation des délais et des coûts de production. 

Si je pouvais donner un conseil ce serait de profiter le plus possible des FabLab, utiliser leurs ateliers électroniques et le matériel qu’ils mettent à disposition. Ça nous a permis de faire les premiers essaies de notre carte électronique sans avoir à payer un prototypiste qui nous aurait peut-être couté 1 000 €. Ça permet de faire des économies dans la phase de développement et de garder les gros investissements pour la partie production. 
Je pense qu’il est aussi très important de faire des préventes pour proposer le produit au public et ainsi, mettre en avant d’éventuels problèmes avant le lancement la production. C’est beaucoup plus simple de modifier un produit ou de rajouter des options avant même que la production soit lancée. 

Retrouvez le premier épisode de notre série consacré à la production Made in France au travers du témoignage d’Alexandre Touzet, fondateur de NanoNap –> NANONAP, L’EXPÉRIENCE COMPLIQUÉE DU MADE IN FRANCE.

Pour ne rien louper des actus industrielles. 

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